Demain les chiens - Clifford D. Simak

mercredi 23 mars 2011
Recueil de nouvelles publié originellement en  1944, ici l'édition française chez J'ai Lu de 2002

Ca faisait un moment que je n'avais plus lu de SF pur jus, old school. Mais finalement, on revient toujours à ses premiers amours, et j'ai pris beaucoup de plaisir à la lecture de ce recueil de nouvelles souvent considéré comme un classique du genre.
Alors je vous préviens tout de suite : ne vous attendez pas à des vaisseaux spatiaux à gogo ou des extrapolations de théories scientifiques avancées. On est ici en pleine "soft-SF", celle de Bradbury ou de Keyes, et finalement, je dois bien l'avouer, mon sous-genre préféré. C'est de la littérature d'idées, sans pour autant être intellectualisante : une lecture abordable et agréable, mais qui continue à faire réfléchir une fois le bouquin refermé. Beaucoup plus proche du conte philosophique, en somme, que du roman d'aventure.

Les huit nouvelles se suivent chronologiquement : on fait entre chacune des bonds de quelques dizaines ou centaines d'années, mais on retrouve à chaque fois les descendants de la même famille, les Webster (ce qui rappelle un peu la narration de Fondation sur ce point). L'ensemble est lié par un fil rouge qui donne son titre au recueil : ces nouvelles seraient les témoignages d'une espèce disparue, l'homme, dans un monde habité par les chiens, devenus des êtres intelligents et formant la nouvelle civilisation dominant la terre. On va comprendre petit à petit comment on en est arrivé là, en commençant à la première nouvelle par un futur très proche (à peu près notre époque, sachant que le livre a été publié pour la 1è fois en 1952), et en accélérant le rythme au fur et à mesure, pour finalement perdre jusqu'à nos derniers repères.
Par ailleurs, on a droit entre chaque nouvelle à un petit commentaire savoureux de "l'éditeur" (chien, donc), qui nous démontre par a plus b que le texte qui suit est selon toute vraisemblance un mythe farfelu, puisque qu'aucune espèce n'aurait décemment pu vivre et penser comme l'homme. C'est bien trouvé et souvent assez drôle, même si ça finit un peu par se répéter.

Vous trouverez ici un résumé détaillé des nouvelles. Je me contenterais de donner mon avis sur chacune d'entre elles.
La Cité est une nouvelle plein de bonnes idées qui distille un parfum envoûtant de nostalgie, même si j'ai trouvé la fin un peu facile.
La Tanière est la seule nouvelle du recueil qui m'a laissé indifférent, bien que l'extrapolation psychologique (le développement d'une agoraphobie aiguë) à partir des éléments introduits jusqu'ici est plutôt bien vue.
Le Recensement est un récit touchant sur l'apprentissage et la transmission du savoir. Le mutant Joe m'a rappelé le Docteur Manhattan des Watchmen (pour son côté complètement détaché de l'humanité).
Les Déserteurs est la plus courte nouvelle du recueil, mais elle va à l'essentiel. Une jolie réflexion sur le thème de l'altérité.
Le Paradis est un véritable petit bijou, et ma nouvelle préférée du recueil. Les implications des idées soulevées dans cette nouvelle sont à faire tourner la tête. L'espèce humaine a-t-elle une valeur intrinsèque? Peut-on envisager son abandon volontaire au profit d'une forme de vie "meilleure", si l'occasion nous était présentée?
Les Passe-temps est une jolie nouvelle d'une certaine mélancolie, traitant de la folie des hommes et de l'espoir d'un monde meilleur.
Ésope (référence à l'inventeur supposé de la fable en tant que genre) aborde les mêmes thèmes que la nouvelle qui la précède, avec le recours à une dimension fantastique surprenant à défaut d'être très convaincant.
Finalement, Un moyen bien simple est intéressante en ce que les humains y sont (presque) complètement absents. Un joli travail d'extrapolation, mêlé à une réflexion sur le thème de l'héritage.

J'ai parfois eu l'impression au cours de ma lecture que Simak n'allait pas "au bout des choses", qu'il posait des prémisses intéressants mais ne les exploitait pas toujours à leur plein potentiel. Mais au final, je me demande si ça n'est pas plutôt un point positif : l'auteur esquisse des pistes de réflexion qu'il nous laisse le soin de poursuivre à notre guise. En tous cas, on ne peut qu'admirer le recul dont fait preuve Simak sur l'humanité, et l'humanité qui justement imprègne chacune de ses nouvelles. Une bien belle lecture.

CITRIQ

Il en parle également : Guillaume

3 commentaires:

Guillaume44 a dit…

Merci pour le lien ! Si tu as aimé Simak je te conseille le recueil paru chez Le Belial il y a quelques temps !

Spocky a dit…

J'ai souvent entendu parlé de ce recueil comme d'un classique, et le sujet me tentais bien. Alors je l'ai acheté d'occasion il y a quelques temps lorsque je suis tombée dessus. Je n'ai toujours pas pris le temps de le lire, mais ta chronique relance ma curiosité. :)

Maëlig a dit…

@Guillaume arf tu me tentes, même si je peux pas trop me permettre de GF en ce moment.

@Spocky j'attends ta chronique! :)

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