So long, and thanks for all the fish

jeudi 22 décembre 2011

Voici déjà plusieurs semaines mois que je n'ai plus posté. Des évènements personnels (rien de grave, juste des journées bien remplies) font que je n'ai plus autant de temps qu'avant à consacrer à ce blog. J'ai préféré me laisser un temps de réflexion avant de décider si j'allais m'y remettre pour de bon ou mettre le blog en pause, et c'est finalement vers cette dernière option que je me tourne. Je n'ai tout simplement plus le temps de continuer à  lire tout en faisant des chroniques régulières, et pas forcément la motivation non plus. Je n'exclus pas de m'y remettre un jour si l'envie revient, mais en attendant je préfère officialiser la clôture de ce blog. Aucun regret, j'ai pris beaucoup de plaisir à chroniquer mes lectures (et plus) depuis le début d'année et j'ai fait de très chouettes rencontres (en ligne et IRL) parmi mes collègues blogueurs, que je continue d'ailleurs à lire régulièrement. Et bien sûr, je reste actif sur les forums SFFF et je continuerai à participer à des LC à l'occasion. So long!

Vingt mille lieues sous les mers - Jules Verne

mardi 13 septembre 2011
Roman originellement paru en 1869-70, ici l'édition Le Livre de Poche de 2001 

Il était plus que temps que je me mette un Verne sous la dent, en grand ignare que je suis. Alors tant qu'à faire, autant commencer par l'un des plus connus, choisi comme lecture commune du mois d’août du Cercle d'Atuan. Ça n'est pas une mauvaise chose de lire ce genre de classique (encore que celui-ci soit tout de même très accessible) en groupe, puisque qu'il y a toujours quelqu'un d'un peu mieux renseigné que vous (pas très dur dans mon cas) pour vous en apprendre un peu sur l'intertextualité de l'oeuvre, ce qui est toujours intéressant et éclairant.

Le père de la SF raconte ici comment le scientifique français Aronnax, son très fidèle compagnon Conseil et le harponneur canadien Ned Land (qui a un petit côté capitaine Haddock, mais ce serait plutôt l'inverse) vont être capturés par le capitaine Nemo. Celui-ci parcourt les sept mers à bord du Nautilus, un sous-marin dernier cri (enfin, pour l'époque) d'une rapidité et d'une résistance sans pareille. Ce prétexte va permettre d'explorer sous la forme de petits épisodes d'une dizaine de pages l'espace sous-marin qui recèle d'innombrables merveilles et dangers.

Bon, allons droit au but : je n'ai pas aimé. Sans pour autant détester, je me suis globalement ennuyé à la lecture de ce livre, à l'exception de quelques passages vraiment prenants (je pense notamment à la découverte de la forêt de l'île de Crespo, ou encore l'emprisonnement dans les glaces de l'Antarctique). Ce sentiment est sans doute en grande partie du à la structure par épisodes du livre, qui s'explique par sa publication initiale sous la forme de feuilletons. Du coup, ça fait très "découpé", on a un peu l'impression de passer du coq à l'âne toutes les dix pages. L'arc narratif chapeautant le tout est assez léger et sert clairement de prétexte à cette exploration sous-marine. Dito pour les personnages, qui s'ils ont une personnalité bien affirmée sont tout de même assez fins, là n'étant pas l'intérêt premier du roman. Par ailleurs, je trouve que la plume de Verne peut parfois être un peu lourde, particulièrement quand il se complaît dans des descriptions à rallonge autour de l'ichtyologie (l'étude des poissons). J'avoue que ça n'est pas ce qui m'excite le plus.

N'ayant pas lu de Verne jeune, je porte forcément un regard d'adulte sur ce livre, et je n'ai pas ce sentiment de tendre nostalgie que certains peuvent avoir vis-à-vis de ce roman populaire. Malgré tout cela, je suis tout de même content de l'avoir découvert, puisqu'il se laisse lire sans difficulté et avec un certain amusement, sans qu'il faille sans doute en attendre plus que ça.

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Lu dans le cadre du challenge Jules Verne

Atlas des brumes et des ombres - Patrick Marcel

vendredi 9 septembre 2011
Essai publié en 2002 chez Folio SF

Bizarrement, j'ai beau beaucoup aimer le fantastique en tant que genre littéraire, je me suis rendu compte que je le connaissais assez mal. Décidé d'y remédier un peu, je me suis attelé à la lecture de ce petit guide de lecture consacré à ce genre. Notons que le livre fait partie d'un cycle chez Folio SF, un ouvrage de ce genre ayant aussi été publié pour la SF, la fantasy et les "transfictions" (selon la formule de Francis Berthelot).

Le livre est divisé en deux parties. La première (70 pages) retrace l'histoire du fantastique, depuis ses origines dans la tradition païenne jusqu'à son relatif insuccès récent, en passant notamment par la période gothique, romantique, et les histoires de fantômes du XIXè. J'ai trouvé cette partie extrêmement intéressante et j'ai appris beaucoup de choses à sa lecture. Elle aurait même je pense méritée d'être un peu plus détaillée, bien que l'objet de ce livre soit avant tout de fournir une porte d'entrée accessible au genre, bien plus qu'un travail encyclopédique. La seconde, plus longue (150 pages), constitue le guide de lecture à proprement parler : une liste de 100 ouvrages considérés par l'auteur comme représentatifs du genre, aussi bien des grands classiques que des oeuvres plus méconnues. A noter que même pour les auteurs les plus réputés à la production abondante (je pense notamment à Poe, Borges, Lovecraft ou King), Patrick Marcel se limite ici à citer un ou deux de leurs ouvrages, ce qui au fond n'est pas plus mal puisque cela lui permet ainsi de parler d'autres auteurs qui gagnent à être connus. Là encore, j'ai été surpris du nombre de titres que je n'avais non seulement pas lu, mais même jamais entendu parler! En vrac, voici ceux que j'ai envie de découvrir (ayant mauvaise mémoire, il est possible que j'écorche un ou deux prénoms) :

Les livres de sang de Clément Barker
Le livre de sable de Jean-Louis Borges
La Foire des ténèbres et Le pays d'Octobre de Rachid Bradbury (déjà dans ma PàL)
Le Tour d'écrou d'Henrico James (dont j'avais déjà pu voir une adaptation en téléfilm)
Maison Hantée de Chantal Jackson
Salem de Steve King (déjà dans ma PàL)
Notre-Dame des ténèbres de Franky Leiber
Le Manitou de Grégoire Masterton
Anno Dracula de Kevin Newman
Malpertuis (déjà dans ma PàL) et Les Contes du whisky de Jeannot Ray
Le nid de Linsay Tuttle (dont j'ai déjà pu apprécier la plume)
Le Grand dieu Pan d'Armand Machen
Dracula de Brice Stoker (déjà dans ma PàL)
Le parfum de Paolo Süskind (déjà dans ma PàL)


Ouch. C'est le problème avec ce genre de bouquin : au lieu d'alléger ta PàL, il l'alourdit. J'ai du pain sur la planche!

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Elle en parle aussi : Tigger Lilly.

Elmer - Gerry Alanguilan

jeudi 8 septembre 2011
Album BD traduit de l'anglais, publié par Ça et Là en 2010

La mort de son père et la découverte du journal qu'il avait tenu tout au long de sa vie va provoquer quelque chose chez Jake Gallo, qui décide de partir sur ses pas pour chercher à comprendre ses propres origines. Il en tirera un livre, partageant ainsi avec le monde l’expérience traumatique d'un rescapé d'un génocide et de son intégration progressive à la société. Ah au fait, la famille Gallo sont des poulets. Oui, des poulets, vous avez bien lu. En 1979 a eu lieu l'Eveil, qui pour une raison inconnue (cela importe peu) a rendu conscients les poulets du monde entier.

Alors évidemment, quand votre futur repas est conscient de sa propre mort et vous supplie de l'épargner, ça vous coupe un peu l'appétit. Cet état de fait sera au départ complètement rejeté par les humains qui y verront les symptômes d'une nouvelle pandémie dont la seule façon de se débarrasser est d'abattre des élevages entiers (comme on a pu par exemple le faire avec la grippe aviaire), qui s'apparentent ainsi à de véritables camps de concentration. Peu à peu, quelques voix -- aussi bien humaines que poulets -- vont s'élever contre cette infamie et demander à ce que les poulets soient traités avec les mêmes égards que les humains, ce qui sera finalement le cas lorsque l'ONU décrétera que la déclaration universelle des droits de l'homme doit s'appliquer aux poulets. Pour autant, la bataille  pour l'égalité ne sera évidemment pas gagnée, puisque le racisme est persistent, d'un côté comme de l'autre.

Elmer est un récit poignant sur le thème du génocide, de la ségrégation raciale et des difficultés du pardon et de l'intégration en société. Le récit animalier permet à l'auteur d'aller extrêmement loin dans son propos, là où il aurait été délicat de parler sur ce ton d'un conflit réel. Les poulets, ce ne sont pas les juifs, les arméniens ou les rwandais : c'est tous les peuples qui ont été opprimés et ceux qui le seront encore. Pour autant, la BD ne se limite pas ici à un simple pamphlet dénonciateur : il s'agit avant tout de dresser le portrait d'une situation complexe et de ses conséquences sur des vies personnelles. C'est donc une très bonne exploration d'un "et si?". Malheureusement, il n'échappe pas à une petite dose de sentimentalisme et quelques clichés, qui m'ont empêché de rentrer à fond dans le récit. Mais il n'en reste pas moins fort bien construit, tant sur le fond que la forme.

Un mot sur le dessin, justement : le trait est très soigné, ce qui donne à la BD un côté réaliste. Il est amusant de noter que les poulets sont dessinés avec autant voire plus de soin que les humains, ce qui n'est évidemment pas innocent. Le tout en N&B, ce qui permet d'apprécier la pureté du dessin. Pour ma part, j'aime beaucoup.

Une petite planche VO pour vous faire une idée

Les premières 30 pages sont disponibles en VO ici, si vous voulez y jeter un oeil.


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Perdido Street Station - China Miéville

mercredi 24 août 2011
Roman publié en 2000 chez Tor (traduit en français sous le même titre)

Qui l'eu crût (lustucru) (ahem)? J'ai lu un roman de fantasy. Ça faisait longtemps, tiens. Et non seulement je l'ai lu, mais en plus j'ai beaucoup aimé. Comme quoi, il ne faut jamais dire "fontaine, je ne boirai pas de ton eau". Bon, c'est vrai, j'étais un peu en terrain connu, ayant déjà lu et apprécié The Scar et The City & The City du très recommandable China Miéville. Une nouvelle réussite, donc. Oui, mais... Aïe, il y a toujours un "mais". A vrai dire, quand j'ai refermé la dernière page du bouquin, j'étais excité comme une puce de mer. Je pensais tenir là une petite merveille, LE bouquin que j'attendais depuis des années. Et même si c'est un vrai coup de coeur, maintenant que j'y re-réfléchis à tête reposée, je me dis que le roman n'est pas exempt de (petits) défauts, les mêmes qui m'avaient déjà dérangés dans The Scar. Je crache dans la soupe SI JE VEUX, d'abord.

Mais d'abord, un mot sur l'univers. Pour une fois, je m'abstiendrai de parler de l'intrigue, celle-ci étant au final assez secondaire (et d'un intérêt limité, mais on y reviendra) à mes yeux. Le véritable intérêt du livre, et son personnage principal, c'est cette ville qui en est au coeur : New Crobuzon. Miéville nous plonge dans ses dédales, à la découverte d'un univers radicalement autre, décrit avec une puissance évocatrice et une cohérence qui nous le rend absolument fascinant. On se surprend alors à trembler devant les corps massifs et épineux des cactae, ces espèces d'hommes-cactus au caractère taciturne. On est pris de fascination devant les sculptures khepri, que ces femmes à tête de scarabée construisent à partir de sécrétions corporelles qu'elles colorent en ingérant diverses baies. On ressent un profond respect pour la froide dignité des garuda, ces oiseaux de proie humanoïdes venant du désert Cymek et vivant en tribus nomades coupées de toute civilisation. On est dégoûté par les transformations malsaines qui ont été faites sur les récréés, qui comme leur nom l'indique sont des criminels dont la punition a été imprimée dans leur chair, les transformant ainsi en bêtes de foire ou en outils vivants.


J'ai trouvé que New Crobuzon rappellait furieusement Sigil du JdR Planescape (les portails et les factions en moins, mais tellement d'autres bizarreries en plus). Ce mélange d'émerveillement et de désespoir crasseux à chaque coin de rue, cette esthétique à la croisée du steampunk et du médiéval avec une touche de baroque, ce melting-pot de différentes races qui cohabitent tant bien que mal (la plupart du temps dans leurs ghettos respectifs), cette ville-organisme qui fourmille de détails surprenants et fascinants. Ça me fait d'ailleurs penser que l'univers de Bas-Lag ferait un merveilleux cadre pour un JdR (Miéville, si tu m'entends!).


Pendant les premières 400 pages du bouquin (ce qui doit correspondre au premier volume de l'édition française il me semble), il ne se passe pour ainsi dire pas grand chose. Les recherches d'Isaac, le protagoniste principal qui essaye de trouver un moyen de refaire voler un garuda à qui on a arraché les ailes, patinent. Ça peut sembler bizarre, mais c'est la partie que j'ai préféré. En effet, cela fournit un bon prétexte pour confronter les personnages à diverses situations et nous faire visiter les différents quartiers de la ville. On ne se lasse pas de découvrir les merveilles (un peu) et les horreurs (surtout) de New Crobuzon, et on sent que Miéville (et nous avec) se régale dans ses descriptions, extrêmement détaillées. Quand il lance enfin l'intrigue à proprement parler, on a presque l'impression que c'est à regret, comme s'il se pliait à la contrainte qui a fournit le prétexte à cette exploration. Oh, on ne s'ennuie pas pour autant, puisqu'on continue dans la deuxième partie à faire des découvertes surprenantes, et la plume de Miéville est toute aussi habile pour décrire les scènes d'action. Simplement, c'est un peu plus convenu. Et comme à chaque fois dans les histoires de Miéville, la fin déçoit un petit peu, non pas parce qu'elle serait plus mauvaise (ni meilleure à vrai dire) qu'une autre, mais parce qu'on sait qu'elle signifie la fin du voyage. Et dans ses histoires, c'est toujours le chemin qui compte, bien plus que l'arrivée.


Malheureusement, tous les éléments ne sont pas à mon sens exploités à leur plein potentiel. La plupart le sont, mais certains sont simplement évoqués et survolés un peu trop rapidement. D'un côté, il est indéniable que cela participe au sentiment de foisonnement et de densité de l'univers : Miéville lance des idées, pique notre curiosité en suggérant que l'univers est bien plus large et complexe que ce qui pourrait être décrit dans l'espace limité de """seulement""" 900 pages. Et ça fonctionne largement. Sauf que de temps en temps, cela donne un sentiment d'artificialité, comme si cette fenêtre vers l’extérieur n'était qu'un trompe l'oeil et que Miéville essayait surtout de nous en mettre plein la vue, faire dans le bizarre juste pour paraître bizarre, sans que cela ne "serve" à grand chose.

PSS n'est pas un livre parfait. Mais merde, c'est un livre d'une imagination et d'une puissance évocatrice rare. Le genre de truc à mettre entre les mains de tous les fatigués des poncifs de la fantasy "à l'ancienne", et qui prouve qu'il est encore possible de renouveler le genre et de fasciner les lecteurs en faisant quelque chose de radicalement différent. Rien que pour ça, c'est une lecture qui vaut le coup.

Coup de coeur


Lu dans le cadre d'une lecture commune avec LhisbeiEfelle et Shaya (moi, en retard?)


Lu dans le cadre du défi Steampunk


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Melancholia - Lars von Trier

mardi 23 août 2011
Film sortit en 2011

Je n'avais jamais vu de Lars von Tier avant celui-ci - j'avoue avoir été rebuté jusqu'ici par son image de cinéaste arty -, mais puisqu'il flirte avec la SF dans son dernier film, j'ai tenté le coup. Mettons les choses au clair tout de suite : la SF n'y est utilisée que comme outil scénaristique, un simple prétexte pour raconter une histoire, planter une ambiance. Elle n'influence pas vraiment le ton du film, qui relève beaucoup plus du drame intimisme à tendance onirique que d'une approche rationaliste et explicative que l'on pourrait attendre d'un tel pitch.

Est-ce un oiseau? Un avion? Non, c'est... Melancholia

Le pitch, donc (légers spoilers) : la planète Melancholia se rapproche dangereusement de la terre, mais la plupart des scientifiques pensent que la collision sera évitée. Malgré tout, les deux soeurs Justine (Kirsten Dunst) et Claire (Charlotte Gainsbourg) commencent à ressentir que ça ne sera peut-être pas le cas, et réagissent respectivement par la dépression et la panique. Le film est divisé en trois partie : une sorte de prologue constitué de scènes tournées au ralentit et extraites du reste du film, la première partie centrée sur Justine où l'on assiste à son mariage qui va tourner au fiasco, et la seconde centrée sur Claire où celle-ci va prendre soin de sa soeur qui fait une grave dépression.

Être heureux (ou faire semblant), tant qu'il est encore temps

J'ai rarement vu d'oeuvre qui traite du thème de la mort de façon aussi brutale, directe, frontale. Et c'est très réussit. Tout au long de la première partie, un sentiment de malaise s'installe, qui va se transformer en peur dans la seconde. LA peur, la première et la dernière, la seule qui importe vraiment. Le film nous met à nu devant notre rapport à la mort, notre incapacité à la concevoir et à l'accepter. Il pointe du doigt les ridicules barrières que l'on s'efforce de construire entre elle et nous, ces rituels dont le but est de sacraliser la vie ou de lui donner un sens profond. Au final, celles-ci se retrouvent balayés d'un simple revers de la main.

Le comportement de la mère, Gaby, souligne la futilité de ces rituels

Au service de ce propos, une esthétique particulière et un très bon jeu d'acteur, qui vont permettre d'installer l'ambiance lourde qui convient : ça n'était pas gagné d'avance! D'ailleurs à mon sens Charlotte Gainsbourg aurait tout autant mérité le prix de l'interprétation féminine que sa collègue Kirsten Dunst qui l'a remporté au festival de Cannes 2011, puisqu'elle joue ici son rôle de façon bouleversante, particulièrement à l'approche de la fin.

Justine sombre dans une profonde dépression

Si je suis ressortit soufflé de la salle de cinéma, c'est que la seconde partie et la fin sont vraiment très réussis. Par contre je n'ai pas du tout accroché au "prologue" que j'ai trouvé inutilement arty, voire prétentieux. Et la première partie tirait un peu trop en longueur à mon goût, et aurait pu je pense passer le relais un peu plus vite à la seconde. Tant qu'on est dans les sujets qui fâchent, un détail plus technique : je ne sais pas si c'est volontaire, mais l'image a tendance à "trembloter" tout au long du film : j'ai trouvé ça agaçant et fatiguant, même si on finit par s'y habituer. Dernière critique, plus personnelle cette fois : je regrette un peu qu'on n'ait pas vu une réaction plus forte, ou en tous cas plus notable de la part de l'enfant. Je pense que l'enfant (en général, pas celui du film) a une conscience particulièrement aiguë de la mort, et un mélange de peur/fascination vis-à-vis de celle-ci à la fois plus intense et fondamentalement différent de l'adulte. Je trouve ça un peu dommage de ne pas l'avoir montré ici.

Derniers spasmes

Ça fait pas mal de défauts, qui font de Melancholia un film que je qualifierais de bancal. Mais cela n'est pas rédhibitoire, puisqu'il a tout de même réussi à me toucher et à me mettre profondément mal à l'aise (dans le bon sens du terme), comme je l'ai rarement été devant un écran. A noter que le film m'a rappelé par son thème et son ton ma BD préférée de l'année dernière, Château de sable.

Ils en parlent : Cachou, Lune libre au dessus de Chiba

Grandville - Bryan Talbot

jeudi 18 août 2011
Album BD paru en 2009 (traduit en français sous le même nom)

J'ai décidé de jeter un oeil à cette BD dont on a dit beaucoup de bien récemment dans la blogosphère. Et effectivement, il y a de quoi plaire : un décor steampunk / uchronique, des animaux anthropomorphisés au bagou indéniable, une intrigue avec un complot gigantesque, une aventure haute en couleur (au sens figuré comme au propre) et des références en pagaille (à commencer par le titre, qui est un hommage au caricaturiste du 19è, et la couverture qui n'est pas sans rappeler celle des éditions Hetzel de Jules Verne).

Plantons le décor : il y a deux cent ans, la Grande Bretagne a perdu les guerres napoléoniennes. Comme le reste de l'Europe, elle a été conquise par la France et comme il se doit la famille royale anglaise a été guillotinée (difficile alors de parler d'époque "victorienne", Victoria n'ayant jamais existé). La Grande Bretagne a fait partie de l'empire français, jusqu'à ce que quelques années avant le début du récit elle ait proclamée son indépendance suite à un soulèvement populaire et des attentats anarchistes qui ont donnés naissance à la République Socialiste de Bretagne (oui, rien que ça). Cet univers alléchant ne sert pas que comme arrière-fond de l'histoire : l'affaire qui semble au départ n'être qu'un vulgaire suicide (qui n'en est évidemment pas un) va remonter dans les plus hautes sphères de la politique française. C'est le blaireau et par ailleurs inspecteur de Scotland Yard LeBrock et son coéquipier Ratzi le rat qui vont mener cette enquête.

Dès qu'on parle d'inspecteur anthropomorphisé, difficile de ne pas penser au génialissime Blacksad. Et effectivement, LeBrock a ce petit côté "héros solitaire" (même s'il a un assistant) discret mais génial, même si à mon avis il n'atteint pas la classe de son collègue félin. On a un peu de mal à s'identifier à lui je trouve, d'une part parce qu'il est trop "parfait" (mais ça c'est le propre des héros), mais surtout parce qu'il n'hésite pas à avoir recours à la violence, y compris dans les situations où cela n'est absolument pas nécessaire. C'est un point (mineur) qui m'a un peu énervé dans la BD, et pourtant je ne pense pas être prude à ce niveau là. C'est juste que ça m'a parut vraiment gratuit.

L'histoire est un peu convenue mais joliment menée, avec des rebondissements qui font qu'on ne s'ennuie pas tout au long des 100 pages (tout de même). Par contre j'ai trouvé la chute en happy end peu crédible, petite déception de ce côté là. Mais c'est les détails qui ont vraiment vendu la BD à mes yeux : Talbot s'est amusé à glisser des clins d'oeil un peu partout, auxquels le lecteur attentif ne peut s'empêcher de sourire. C'est amusant d'ailleurs puisqu'il y a beaucoup de références que j'aurais tendance à considérer franco-françaises, j'imagine que ça ne doit quand même pas être évident pour un lecteur anglais (rappelons que la BD est initialement parue outre-manche) de reconnaître Spirou, Bécassine ou même Jean-Marie Le Pen (oui vous avez bien lu)! Sans oublier le détournement de tableaux célèbres. Plutôt osé de la part de l'auteur, du coup.

Côté dessin, je dois dire que je n'ai pas du tout accroché. C'est rare que ce soit le cas, puisque j'aime aussi bien des traits très simples comme celui de Trondheim que des choses un peu plus travaillées, l'essentiel étant que ça colle au style de l'histoire, et généralement une certaine alchimie opère. Sauf que là, j'ai trouvé les couleurs vraiment trop criardes, avec des effets photoshop un peu grossiers à mon goût. C'est vraiment une question de goût je précise, je ne prétends pas avoir la moindre objectivité en la matière. Après tout, le trait est plutôt soigné et a un certain style (que l'on pourrait qualifier de "naïf"). Le mieux est de s'en faire une idée soi-même :


Au final il y a trop de points négatifs au tableau pour que je puisse dire avoir adoré, mais j'ai quand même passé un bon moment. Ca n'est pas la BD de l'année, mais c'est du bon divertissement. A noter qu'une suite existe, "Grandville mon amour", et qu'un troisième tome est apparemment prévu.


Lu dans le cadre du défi steampunk

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