Long métrage sortit en 2010 |
Transfer est une petite production allemande, injustement passée inaperçue lors de sa sortie l'année dernière. Adaptation de la nouvelle "Thousand Euros, One Life" d'Eli Barcelo, c'est un film de SF pur jus à tendance dramatique. Le genre qui dérange, qui transgresse des interdits et des tabous dans le but de nous interpeller sur nos propres limites et nos valeurs morales. On y aborde des thèmes tels que le lien entre l'identité et le corps, l'idée de la numérisation de l'esprit, l'amoralisme des compagnies privées, les inégalités de richesse, le racisme et même l'eugénisme (plutôt couillu pour un film allemand, ce qu'il faut saluer).
C'est l'histoire d'un couple allemand en fin de vie mais bourré aux as, qui malgré certaines réticences décide d'essayer un nouveau service vendu par une société de biotechnologies qui propose moyennant finances de transférer leur conscience et leurs souvenirs dans de nouveaux corps afin de leur donner une sorte de nouvelle vie. Ces corps sont ceux de "volontaires" qui ont accepté de céder leur enveloppe corporelle en échange d'une partie du payement qui sera envoyée à leurs familles, en Afrique. Leur conscience sera "endormie" et ne se réveillera que 4 heures par jour, quand les nouveaux propriétaires du corps seront eux en train de dormir (ça va, vous suivez?). Les deux consciences habitant le même corps restent (en théorie du moins) parfaitement hermétiques, et leurs souvenirs sont également séparés. Petit à petit, ces deux couples (les vieux et les africains) vont s'habituer à vivre ensemble, mais une série d’évènement va faire surgir des tensions...
La future enveloppe corporelle du vieil Hermann |
On a là un film extrêmement ambitieux, s'ouvrant sur un prémisse à la fois terrifiant et fascinant. Il aurait pu s'emmêler les pinceaux pour n'être qu'au final un méli-mélo d'idées intéressantes mais sous-exploitées, ou au contraire faire passer les idées au premier plan au détriment du ressentit des personnages et rendre au final très froid. Il évite assez bien ces deux écueils, et rien que pour ça je pense qu'on peut dire que le film est une réussite. Une fois l'idée de départ acceptée, on voit venir l'intrigue grosse comme une maison, mais ça n'est pas grave, puisque celle-ci est bien menée, et les acteurs jouent dans l'ensemble assez juste. Il mérite très certainement le prix qu'il a reçu au BIFFF.
Le transfert de conscience |
Transfer rappelle furieusement Gattaca, tant sur le fond (manipulation du vivant, l'homme confronté aux technologies) que sur la forme (un traitement un peu naïf, une forme d'angélisme sur la nature humaine), et même visuellement (des décors très épurés et des environnements très clairs). C'est visiblement une des inspirations principales du réalisateur, qui ne s'en cache pas. On y retrouve d'ailleurs les mêmes failles, peut-être plus marquées encore : une histoire et des personnages trop "lisses" voire stéréotypés pour être vraiment crédibles, et un traitement un peu naïf / rentre-dedans qui peut parfois un peu agacer. Avant de me faire taper dessus, je précise que j'ai quand même beaucoup aimé Gattaca (tout comme j'ai apprécié ce film). Si c'est aussi votre cas, foncez sur Transfer, je pense que vous ne pouvez pas être pas déçu. Encore faut-il mettre la main dessus, et ça c'est une autre paire de manches... J'ai écrit au réalisateur pour savoir s'il avait prévu de le sortir en DVD, je mettrais ce billet à jour s'il me répond.
EDIT : le réalisateur m'a répondu et m'a très gentiment proposé de m'envoyer une copie. Je ne la mettrai pas en ligne par respect pour son oeuvre (et étant donné la possibilité d'une future sortie DVD), mais vous pouvez me contacter si vous voulez que je vous la prête.
2 commentaires:
Je serais bien tentée par ce film je dois dire (j'adore les réflexions autour de l'eugénisme - Greg Egan a d'ailleurs fait une belle nouvelle sur le sujet). Je vais faire le tour des bouquineries bruxelloises samedi normalement, mais je pense que ce n'est pas de ton côté...
Je te préviens dès que je reçois la copie!
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